NICOLAS KER « ALADDIN »

18 octobre 2010. 20h30. Quand je rencontre Nicolas Ker chez lui près de Barbès, ce n’est pas pour parler de son groupe Paris, qui s’apprête pourtant à sortir son deuxième EP, In Crowded Subways, ni de son groupe Poni Hoax, qui prépare son troisième album, State of War, encore moins pour parler de son groupe Aladdin, toujours dans les limbes, sans le moindre Myspace. Non, c’est pour parler jeux vidéo pour le compte de la revue Amusement. Un comble pour un mec qui hormis quelques parties de Street Fighter IV lors de soirées enfumées-arrosées entre potes n’a pas touché de console depuis son adolescence. Placée sous le signe de la Sega Mega Drive l’adolescence. De Sonic le hérisson, Quackshot, Kid caméléon et NBA live hein. Alors les jeux d’aujourd’hui, tous ces trucs à mondes ouverts et ces role player game (RPG) comme World of Warcraft (WOW), je n’y connais rien. Mais alors rien de rien. Mais je m’en fous. Interviewer c’est poser des questions et poser des questions suppose parfois qu’on ne sache vraiment rien des réponses qui vont tomber. Qu’on est là pour apprendre, imposteur la fleur au fusil et la gueule enfarinée. We’ll see.

Et à vrai dire quand je rencontre Nicolas Ker pour lui parler jeux vidéo ce n’est pas comme si j’étais guère plus calé côté musique. Je sais qu’il est l’égérie d’une certaine famille de médias pour être le chanteur des trois groupes suscités. Placée sous le signe de la sainte trinitouille underground Technikart / Syndicat du Hype / Gonzaï les médias. Qu’il le mérite. L’électro rock cold wave de Poni Hoax, Paris et Aladdin c’est du high high level. Son chant y règne, croon dark, imprécateur, faisant des ravages dans le rayon Bowie, Jarvis Cocker, Scott Walker, Lou Reed, Ian Curtis, Jim Morrison. Charrie leurs ombres. Ses ombres. Tanière et true love’s gutter. Vous-même sans le savoir vous connaissez sûrement leur tube « Antibodies ». Un soir ils l’ont joué dans l’émission One Shot Not d’Arte. Une tuerie. Rock, dancefloor, tout. Ils mettent à l’amende bien des groupes d’Outre Atlantique et d’Outre Manche. S’exportent, sortent du cadre. J’ai écouté tout ça, surtout Images of Sigrid (2008), le deuxième Poni Hoax où figure « Antibodies ». C’est fort, noir, novateur, ça m’impressionne, c’est bien que ça existe, mais si je suis sincère avec moi-même, comme Joy Division, contrairement aux Smiths, c’est un peu trop underground-anti-complaisant pour moi. Ce n’est donc pas vraiment ma came. Expression placée sous le signe des expressions à bannir.

Quand je rencontre Nicolas Ker je ne sais donc pas qui est Gilb’R avec qui il forme Aladdin (Gilbert Cohen est le fondateur du label électro Versatile). Je ne sais pas qu’après avoir sorti ses deux premiers albums sur le label électro Tigersushi, Poni Hoax s’apprête à sortir le troisième chez Sony / Columbia (mais le deal capotera peu de temps après l’entretien car le directeur artistique responsable de leur signature sera placardiser après l’échec commercial du dernier Yannick Noah). Je ne sais pas non plus que le premier Aladdin sortira le 3 juin 2011. Mais voilà, lors d’une soirée enfumée-arrosée entre Gonzaï boys & girls : l’étincelle. Apprenant que je viens d’entamer une collaboration de pigiste avec Amusement (silex 1) Stéphane Guinet, RP chez Ekler’o’shok (silex 2), me révèle que Nicolas Ker est un fou de jeu vidéo (ce qui tombe bien car il bosse actuellement sur la promo du deuxième EP de Paris). Qu’il fulmine de théories philosophiques sur WOW & co. De « théories philosophiques » sur les jeux vidéo ? Vraiment ? Ça sentait l’aventure, le mystère, l’histoire en marche (avec un petit « h »). J’ai senti mon côté gonzo candide refleurir de plus belle. On a pris RDV.

Mais quand je rencontre Nicolas Ker, ce 18 octobre 2010, à 20h30, chez lui, près de Barbès, c’est l’apocalypse WOW. Goudron et plumes. Plus tôt dans l’aprem Stéphane m’avait pourtant prévenu : « Il est en petite forme, il a commencé à boire à 16h ». Par article interposé sur Gonzaï, Bester, qui en a fait sa Lou Reedienne bête noire, m’avait lui aussi mis en garde : « Poni Hoax, juillet 2007, Flèche d’or : deux heures de vortex avec un chanteur illuminé qui recrachait mes mots comme des dents cassées. » Mais comment s’attendre à ça ? Nicolas Ker est tellement bourré-possédé que j’ai l’impression de faire face au Nicholson de Shinning et au Joker de Batman. Là-dedans il fait tout noir. Je ne sais pas trop où je mets les pieds. Manque plusieurs fois de tomber. On arrive dans sa grande cuisine quasi plongée dans le noir. Je m’assois. Lui non. Accélérateur de particules, il tourne en rond comme un lion en cage, carbure au bloody mary de Leader Price, jubile d’un enthousiasme à faire tomber les murs, m’enfonce dans le rôle inconfortable du mec normal. Lui Spector, moi spectacteur. J’offre les cigarettes. Quand il découvre que je ne suis pas son semblable en passion, juste un imposteur, un brebiau égaré qui ne connait rien à la Chose, le piège se referme : je me fais saucer. A lad insane. Esthète of war(craft). J’arriverai quand même à lui faire parler musique. (NB : Entretien retranscrit sans prendre en compte toutes les lettres en CAP, points d’exclamations et mentions (rires), démoniaques et de tabula rasa, qu’il aurait fallu faire figurer pour être fidèle aux propos tels que délivrés ce soir-là par Nicolas Ker.)

« Avec WOW, j’ai vraiment l’impression d’être au PS ! »

 

Bonjour Nicolas. Un mec de ton label m’a dit que t’étais un vrai fan de jeu vidéo…

Ouais, y’a que ça qui m’intéresse, le reste je m’en fous ! Je suis un vrai geek de jeux vidéo !

Chez toi ça prend quelle forme ?

Les RPG. En gros moi je suis à bloc dans les RPG. J’ai commencé par ceux du Commodore 64. Vers 82-83. Je viens vraiment de ces vieux trucs, genre Ultima 4. Chez moi j’ai tous les émulateurs, pour Spectrum, etc. Mais aujourd’hui mon jeu vidéo préféré c’est WOW. En ce moment je peux pas y jouer parce qu’on m’a coupé internet mais WOW ça me rend fou. C’est grave : ma guilde c’est ma vie !

Tu as découvert ce jeu à ses débuts ?

Non, du tout. J’ai pris le truc en cours de route.

D’habitude combien de temps passes-tu à y jouer ?

Trois soirées par semaine. De 21 à 24h. Je suis dans une guilde high level. On doit être 25 et il n’y en a pas un qui doit délirer, parce que là on est en mode hardcore.

Quel genre de personnages y joues-tu ?

En fait dans WOW le joueur a le choix entre trois rôles, il est soit tank, soit DPS, soit healers. Les tanks c’est ceux qui te défoncent la gueule ; les DPS, pour damage per second, sont aussi des guerriers, ce que je suis – je suis un mage, je balance des sorts toute la journée, DPS, DPS, DPS, j’ai déjà essayé d’être autre chose, genre un tank mais je suis un très mauvais tank – les healers enfin sont ceux qui guérissent les autres avec des heals per second. Et ce qui se passe par exemple dans des raids c’est qu’un boss débarque et t’as le tank qui se prend tout dans la gueule, DPS, DPS, DPS, alors les healers tank et les healers DPS interviennent.

Et ça t’inspire en tant que musicien ?

Non, ça n’a rien à voir avec la musique ! En fait, moi, entre guillemets, je suis un « artiste », et en tant que tel je me dis que je me dis que je n’ai pas le droit d’adhérer à un parti politique. Je refuse d’adhérer au PS, je trouverais ça chelou, alors que je suis PS. Et WOW ça me permet de le faire ! Là d’un coup dans ma guilde je rigole avec les officiers, les game masters, je vois tout le monde qui s’engueule et j’ai l’impression d’être vraiment au PS. Voilà, la question de la guilde et l’avatar dans WOW pour moi c’est politique car c’est la seule manière que j’ai trouvé pour être politisé en tant que musicien qui ne veut pas l’être. Mais attends, il y a un autre truc monstrueux dans WOW, tellement que je ne comprends pas que les gens ne l’aient pas vu. C’est les healers, je trouve ça hallucinant que le monde n’ait pas compris l’importance des healers !

Quelle importance ont-ils à tes yeux ?

C’est des mecs qui guérissent et qui sont souvent joués par des guildes masters, c’est-à-dire des gros cons qui n’arrêtent pas de te répéter que tu ne joues pas bien ! Je trouve ça génial parce que dans la vie ça n’existe pas ! Dans la vie quand t’as affaire à des mecs pas sympas qui ont le pouvoir d’un guild master c’est des Damage Per Second. Toujours. Dans la vie tu n’as que des DPS. Parce qu’on est dans une société où ceux qui guérissent sont traités comme des merdes. On est dans une société où c’est « Bam, bam, bam ! je fais 1000 DPS par seconde ». Je ne supporte pas. Par exemple Sarkozy c’est rien qu’un gros DPS ! une merde de DPS ! C’est aussi pour ça que j’aime WOW. J’y vois l’idée primordiale du healer. Pour moi c’est un truc qui devrait vraiment être pris en compte dans la société.

En as-tu parlé avec des healers ?

Bien sûr que je leur en ai parlé ! Mais ils n’en ont rien à foutre. Ils font tous autre chose dans la vie, ils sont plombiers… D’ailleurs ce que j’aime aussi dans WOW c’est qu’ils n’en ont rien à carrer que je sois chanteur de rock. Tu as des mecs dans ma guilde qui me font  : « Putain, mais t’es Nicolas Ker ! Le mec de Poni Hoax ! J’adore, je t’ai vu à la télé et tout ! » Mais la plupart s’en foutent. Je trouve ça très intéressant.

Par contre j’ai du mal à comprendre que tu parles de politique à propos de WOW parce que la politique traite du réel. Or, par définition, on ne peut pas avoir un « réel » impact politique en jouant à un jeu vidéo puisqu’il nous projette dans un espace virtuel…

Pour l’instant tout ça est très trouble, vague, mais tu verras, bientôt WOW envahira le monde.

A part WOW, quels jeux aimes-tu ?

Ce que j’aime ? The Void ! C’est des russes complètement barrés qui font ça, Ice-Pick Lodge. Eux ils font du pur game design de barré ! Dernièrement j’ai aussi bien aimé Fallout 1 et 2. Mais à part ça je trouve que tout est de la merde. Fallout 3, c’est une honte ! Fallout 1 et 2 c’est des chefs d’œuvre, mais Fallout 3 est insupportable. Pareil pour Oblivion. J’aime bien Daggerfall et Morrowind, mais Oblivion pour moi c’est une merde ! Je déteste. Au niveau 1 tu as beau être le chef de la guilde tout à coup une nana ne trouve rien de mieux à te dire que : « Va choper des fleurs ». Comment tu peux jouer à un jeu où on te dit demande d’aller chercher des fleurs alors que les portes de l’enfer sont en train de s’ouvrir (rires) ? On nous prend vraiment pour des cons ! Les mecs qui font ça, Bethesda, c’est vraiment des connards ! Désolé, je vais passer pour un snob mais je le suis : Oblivion, Fallout 3, fuck, allez vous faire pendre (rires) ! Je déteste aussi les grosses merdes de BioWare, genre Mass Effect 1 et 2.

Et t’es branché « jeux à mondes ouverts » ?

Non, pas vraiment, à part ceux qui sont « indie ». Par exemple ce que font les mecs de Spiderweb avec un jeu comme Overnom 6, ça c’est pas n’importe quoi !

Finalement toi qui aimes les RPG, tu n’aimerais pas plus les jeux de rôle grandeur nature que toute autre forme de jeux vidéo ?

Etre larpin ? Ah non, les LARP (live action role-playing, nda), c’est trop nerd pour moi. J’en veux pas aux mecs, ils font ce qu’ils veulent, mais là moi j’aurais du mal.

Et donc tu persistes à dire que ta passion des jeux vidéo n’interfère en rien avec ta passion de la musique ? La première ne nourrit pas la seconde ?

Non, j’en ai rien à foutre de la musique ! Moi si je devais vraiment faire un truc ce serait du game design. Oui, un jeu vidéo. Mais un génial. C’est mon rêve ! Mon rêve absolu depuis 15 ans ! Je suis même allé jusqu’à emmerder Ubisoft avec une idée de game design. Mon trip c’était de faire un jeu d’aventure où le personnage aurait pu faire des sauts dans le temps. Il y avait un scénario de base avec une sorte de temporalité classique et je voulais qu’elle fluctue en fonction des déplacements géographiques du joueur.

Tu avais les compétences pour échafauder tout ça ?

Pas trop, c’est super chaud le game design. Pour me montrer la voie à suivre afin de présenter mon idée un pote m’avait donc envoyé un gros doc sur le sujet et j’avais bûché et je leur avais apporté mon gros doc à Ubisoft en leur disant : « Les mecs, ça c’est du génie ! ». Ils m’ont dit : « C’est très intéressant mais tu voudrais pas plutôt faire un spin off de Rayman ? » J’ai fait : « Mais franchement vous êtes des connards. Avec 1% du budget de Rayman je vous fais mon jeu et vous vous me demandez un spin off de Rayman ? Tchao ! » Et après qu’est-ce qui s’est passé ? J’ai vu qu’un des meilleurs jeux au monde fonctionnait sur une idée proche du mien.

De quel jeu s’agit-il ?

C’est Zelda Majora Mask sur Nintendo 64. Mon jeu préféré ! Un chef d’œuvre ! A chaque fin de journée tu reviens en arrière. Tu vis donc toujours la même journée mais en étant conscient de ce que t’as déjà fait. Le but est donc d’essayer de comprendre pourquoi tel personnage t’as dit ce qu’il t’a dit, etc. Je trouve ça hallucinant car pour moi c’est ça qui est mortel dans le jeu vidéo : le fait de pouvoir jouer avec le temps. Et je ne suis pas le seul à le penser. Maintenant plein de jeux vidéo se basent sur ça. Et c’est le seul média qui peut faire ça. Avec un livre tu vas de la première à la dernière ligne, un disque de la première à la dernière note, un film de la première à la dernière séquence mais pas avec un jeu vidéo. En tant que joueur tu peux manipuler le temps !

Je vois…

En fait pour moi c’est très simple : le roman était l’art du 19e siècle, le cinéma celui du 20e, et le jeu vidéo est celui du 21e. Il ne faut pas cherche plus loin ! C’est là, ça crève les yeux. Pour moi le jeu vidéo c’est pas un truc pour rigoler, c’est une œuvre d’art ultime. Le plus grand art actuel. Au 20e siècle des gens comme Godard se disaient cinéphiles. Ils pouvaient passer leur vie dans les cinémathèques. Bien moi je suis vidéophile. Je peux passer ma vie sur des jeux.

D’autres membres de ta famille partagent ta passion pour les jeux vidéo ?

Non. Je joue parfois à WOW avec ma sœur – elle a pris le même rôle que moi, mage – mais c’est une newbie, une grosse loseuse, donc je dois toujours tout lui expliquer (rires) !

Et du côté de Poni Hoax ?

Non, c’est pas leur truc.

Ta nana ?

Non, elle y comprend rien. Dans mon entourage je suis le seul à être bloc là-dessus

C’est ton jardin secret…

Ah non, le jardin secret c’est la pornographie. Toujours.

La pornographie ?

Évidemment. Si t’as un portable t’as forcément des films de cul dessus.

Ben non pas forcément…

Si t’en as. Tu veux pas l’avouer mais t’en as !

Aujourd’hui avec le web on n’a plus besoin d’en avoir…

Enfin oui, à la rigueur tu vas sur pornhub ou x vidéos, mais voilà : tous les mecs qui ont des ordis sont dans le porno. Aujourd’hui faut aussi bien voir ça : on est dans une société pornographique. Pour moi c’est super important. Je vais aller interviewer sur le sujet un mec que j’adore et qui s’appelle Jess Franco.

Qui est-ce ?

Maintenant c’est un vieux en chaise roulante mais à la base c’est un super cinéaste espagnol. Il a dû faire quelque chose comme 300 films. Des films qui sont à moitié hardcore mais pas que. Il a aussi bossé avec Orson Welles.

T’es en contact avec lui ?

C’est en cours. J’ai prévu ça pour ce mois-ci.

Et niveau game design, t’as une nouvelle idée, tu cogites ?

Non, j’ai rien trouvé d’autre.

Tu aimerais avoir un autre projet à proposer ? Un projet qui marche et t’accapare ?

Oui mais non parce qu’en même temps je suis chanteur de Poni Hoax, et c’est ce qui me permet de gagne ma vie.

En plus de Poni Hoax tu as un autre groupe, Paris, qui sort tout juste un nouvel EP, In Crowded Subways. On en parle ?

On s’en fout (rires) ! Allez viens je vais te faire écouter. (Il file à l’étage et je l’accompagne à tâtons dans l’obscurité du hall et des escaliers en essayant de pas me casser la gueule. On atterrit dans une chambre où sa nana dessine sagement, assise en tête de lit avec un chat sur les genoux. Tellement qu’au départ je l’ai pas vu. Assis au pied du lit lui déplie un ordinateur portable et se met à me lancer des mp3.) En fait j’ai trois groupes. J’ai Paris et c’est pas un truc de connards. Avec Paris on fait des trucs vraiment destroy. Écoute ça, c’est bien, vraiment violent, presque death metal. Moi j’adore le death metal ! Je suis à bloc death metal ! (Le morceau envoie effectivement du lourd, à base de gros lacis de guitares anxiogènes, DPS, DPS, DPS.) Sinon j’ai un autre groupe qui s’appelle Aladdin.

Ah, celui je connais pas.

Bah en fait personne connaît. C’est juste Gilb’R et moi. On est en train de faire le disque et avec ça tout le monde va halluciner. Coute. (La musique qui sort de l’ordi est plus électro, pyschée, cosmique. Plus healers.)

Tout ça ne semble pas si éloigné de ce que tu fais déjà avec Poni Hoax…

Ouais, Aladdin, Poni Hoax, Paris, tout ça c’est toujours la même chose : c’est moi, moi (rires) ! (Il enchaîne les morceaux tête baissée sur son laptop, s’écroulant à moitié, assommé d’alcool.)

Ça s’est un nouveau morceau de Poni Hoax ?

Oui, on en a 17. On vient de signer chez Columbia.

Cool, une major.

Mortel. Ils mettent 500 000 euros sur nous.

La sortie du disque est prévue pour quand ?

On sait pas encore. Quand on l’aura fini. Moi j’ai dit aux mecs de Columbia : « Ma famille s’est faite buter au Cambodge : je veux enregistrer les voix au Cambodge » Ils ont dit : « Ok. »

Tu penses que ça va apporter quelque chose aux morceaux ?

Grave ! (La musique continue de s’écouler de son laptop. Il continue d’avoir la tête penchée dessus, qui flotte entre transe et somnolence.)

Ce sera donc un nouvel album interminable de 17 morceaux comme le précédent ?

Non, on va en garder que 10. J’ai exigé qu’il n’y en ait que 10.

Et ce ne sera que des nouvelles compos ?

Bah oui, parce que les nouvelles sont meilleures, écoute. (Il change encore de morceau.) Enfin je sais pas si t’aimes Poni Hoax.

Si, plutôt. Mais comme vous allez bénéficier de plus de moyens que par le passé et aussi d’une plus grande visibilité, je me dis que vous pourriez avoir envie de ré-enregistrer d’anciens morceaux pour les améliorer et les faire découvrir à un plus large public.

Non, non.

Mais tu es excité à l’idée que ce deal vous permettre de toucher un plus large public ?

Moi Columbia ils m’aiment pas. Ils aiment bien les autres Poni Hoax mais moi ils me trouvent chelou (rires) ! Du coup je les vois pas. C’est bizarre hein ! (Sa nana n’a pas bougé d’un iota depuis tout à l’heure, elle est toujours assise leur lit à dessiner avec le chat sur les genoux tandis qu’on écoute de la musique destroy. Il m’apprendra juste après qu’elle travaille comme illustratrice de livres pour enfants.)

Ils vous ont collé un directeur artistique ?

Ils racontent que des conneries, moi je m’en fous, je les laisse parler !

Comment en êtes-vous venu à signer avec eux ?

Ils ont tripé sur nous. Ah, écoute, ça s’est bien. (C’est vrai que ça l’est. Ce morceau est plus incisif, avec un riff assez bluesy, répétitif qui attaque les chairs tout en étant hypnotique, lancinant, là où le précédent ennuyait comme un mec respectant une limitation de vitesse à 40.)

Poni Hoax c’est le groupe où tu t’investis le plus ?

C’est le projet où je gagne le plus de thunes. (Et hop il replonge dans son ordi. J’ai l’impression de faire la discute à un camionneur qui m’aurait pris en stop mais qui serait plus intéressé par se lobotomiser en fixant l’obsédante succession des bandes blanches. Je me demande ce que je fous-là, mais je peux pas sauter du véhicule, je dois aller au bout du truc.)

J’ai entendu dire que tu avais un autre projet en tête : reprendre des chansons de Noël ?

Grave ! Nicolas Ker chante Noël (rires) !

C’en est où ?

Nulle part, personne veut le faire ! Mais imagine, ce serait drôle ! Que des trucs de Noël pourris (rires) !

Avec des orchestrations…

Pourries (rires) ! (Il replonge dans son ordi et déclare au bout de deux secondes, alors que le riff blues de tout à l’heure se répète sans que rien ne décolle.) En fait c’est chiant Poni Hoax ! (J’en profite pour me lever, faire signe que c’est bon, que j’ai ce qu’il me faut. On regagne le rez-de-chaussée. Il y fait toujours noir. J’essaie à nouveau de pas me casser la gueule. Il a pris son laptop et ses enceintes avec lui. Le voilà qui les installe péniblement près de sa gazinière. Il avait juste envie de descendre pour faire péter le son sans déranger sa nana.) Moi le seul morceau de Poni Hoax que j’aime c’est celui-là. On est en train de le faire. (Le morceau se met à déflorer les enceintes, épique, guerrier.)

T’écoutes quoi en ce moment ?

Que du death metal et du doom ! ça déchire ! (Il se met à faire plein de bruits bouche apocalyptiques.) J’aime bien. Enfin j’aime vraiment mais je suis pas super fan. (Il s’enfonce la tête dans les enceintes comme s’il était en rave ou qu’il enfilait une capuche de mage. La musique cafouille le silence et l’espace entre nous.) Ah ce morceau c’est bien quand même !


4 réponses
  1. jeremie
    jeremie dit :

    Faut que j’écoute aladdin et poni hoax et paris. le visuel de la pochette qui clos l’article est excellent.
    il faut !
    je dois le faire !
    écouter !

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