MEET IS MURDER (VIOLENS)

19 juillet 2010. Comme souvent un mail m’arrive pour m’apprendre la sortie prochaine du nouvel album du nouveau groupe pop qui va tout pĂ©ter. Celui-ci s’appelle Violens. Il vient de New York, est tenu par un certain Jorge Elbrecht et son premier album, Amoral, prĂ©cĂ©dĂ© du single « Acid Reign », a dĂ©jĂ  dĂ©clenchĂ© les vivas de la presse. Pour Les Inrocks, leur musique Ă©voque la rencontre de My Bloody Valentine, de Joy Division et des Doors. Pour Magic!, « l’étourdissement qui prĂ©cĂšde un premier baiser ».

Il n’y a que Mal qui m’aille

Tout ce blabla de pubeux qui tirent la couverture Ă  eux ne m’a fait ni chaud ni froid, mais quelque chose a fait que je leur ai prĂȘtĂ© plus d’intĂ©rĂȘt qu’aux autres groupes qui en sont d’habitude l’objet. Quelque chose qui me fit dire que j’allais sĂ»rement demander le disque et l’interview Ă  l’attachĂ©e de presse alors que sĂ©rieux j’avais dĂ©jĂ  d’autres trucs sur le feu. La raison ? Ce n’était pas « Acid Reign », bien que son triangle amoureux (et violent) entre noise, new wave et sixties pop dessine un hĂ©roĂŻsme schizo au fort goĂ»t de revenez-y. Pas le titre de leur disque oĂč je flaire du Nietszche et un manifeste salĂ© contre l’indie rock pĂšte couilles (il n’y a que Mal qui m’aille, mĂȘlons le bon goĂ»t et le mauvais). Ni mĂȘme l’artwork de leur pochette de disque, qui dans un mĂȘme visage de table rase semble avoir phagocytĂ© celles de Ride (Nowhere), des Smiths (The Smiths, Meat Is Murder, The Queen Is Dead, Strangeways Here We Come), des Pale Saints (The Comforts Of Madness) et de My Bloody Valentine (oserais-je dire que j’y vois aussi le The Bends de Radiohead ?). Non, ce n’est pas mĂȘme pour cette fascinante « face without eyes » oĂč turbinent, pleine d’une sourde menace, d’inquiĂ©tantes images. C’est juste que je voulais rencontrer le mec de Caroline Polachek.

La tronche de kebab

Comment ça ? Je vous ai pas dit ? J’ai total craquĂ© sur cette fille. Je l’avais rencontrĂ© au ZĂ©nith il y a un peu plus d’un an quand son groupe Chairlift avait ouvert pour Phoenix. J’avais alors passĂ© toute l’interview Ă  essayer de pas tomber dans ses yeux, ses cuisses, son haut, Ă  tenir le fil de mes questions. Dur. Avec ses airs de Bambi et de Diane chasseresse, cette fille sidĂšre comme la neige en Ă©tĂ©. Devant elle je me sentais tout nu. Pour tout dire quand je suis allĂ© voir Violens Ă  la FlĂšche d’or le 20 novembre dernier, je me disais : « Sera-t-elle lĂ  ? La verrais-je ? » Caro Ă©tait au stand de merchandising du groupe, splendide dans son t-shirt nĂ©gligĂ©, cheveux nouĂ©s Ă  l’arrache, traits un peu tirĂ©s. Je pouvais pas m’empĂȘcher de la regarder, et la pop rock des braves gars d’Airship qui prĂ©cĂ©daient Violens me laissait tout le loisir de le faire. D’oĂč j’étais, je me gĂȘnais pas. Mais comme je me sentais pas de rester spectateur, que je venais de les interviewer et que l’alcool commençait Ă  faire effet, je suis allĂ© les voir en me disant que je trouverais un truc Ă  dire.



« Hey, les gars, dis-je, saisissant un exemplaire vinyle d’Amoral, vous trouvez pas que le type sur pochette d’album a une tronche de kebab ? » « Ah ouais ! », me dit Miles. Et lĂ  le coup de gĂ©nie : « ça vous dirait que je vous envoie l’interview de Prefab Sprout dont on parlait tout Ă  l’heure ? » (Je savais qu’elle et lui Ă©taient fans) « Ah ouais ! », me dit Jorge, joignant le geste Ă  la parole en me laissant son mail sur une feuille. (Pas fou le mec, il a pas laissĂ© sa cop’ prendre les devants.) Alors quand j’ai appris que Caro Ă©tait avec le leader d’un groupe nommĂ© Violens, une partie de moi a pris note de son existence, attendant la sortie de son disque pour lui tomber dessus.

L’amour et la Violens

Mais c’était pas juste de la foutue curiositĂ© de mec. Ni mĂȘme le pressentiment que je tiendrai une histoire (quoique
). Je me disais juste qu’une fille comme elle, douĂ©e comme elle, belle comme elle, devait forcĂ©ment aimer un mec gĂ©nial. J’ai Ă©coutĂ© l’album de Jorge et comme celui de Caro,  j’ai adorĂ©. Ça ne s’est pas fait comme ça. Jorge l’avait dit Ă  Magic!, il envisage « la prod comme une sculpture » et « les Ă©couteurs comme le thĂ©Ăątre de sa dĂ©flagration ». Et j’ai Ă©tĂ© secouĂ© car il sculpte comme CĂ©sar, un son plein de scarifications d’oĂč jaillissent parfois des trous noirs. A la premiĂšre Ă©coute ça m’a sonnĂ©. Ça tirait tellement de tous les cĂŽtĂ©s, stellaire et pied au plancher,  upside down mais fruit d’un mĂ©lodisme chevronnĂ©, j’avais du mal Ă  suivre mais j’étais happĂ©.  C’était comme si MGMT avait Ă©chouĂ© dans une rue coupe-gorge et se faisait faire la tĂȘte au carrĂ©. Au dĂ©but j’avais trouvĂ© ça bizarre mais maintenant que j’avais le sĂ©same je kiffais.

On a beaucoup associĂ© les deux. Violens et MGMT. Parce que Jorge est pote avec eux. Qu’ils ont sorti leur premier EP chez le mĂȘme petit label brooklynois (Cantora Records), qu’ils font tous les deux une pop qui mĂ©lange ambitieusement les Ă©poques et les genres. Vu la popularitĂ© de MGMT et le fait que Congratulations, leur trĂšs attendu deuxiĂšme album, est sorti six mois avant Amoral, Violens a profitĂ© de leur retour en grĂące mĂ©diatique. Mais la comparaison s’arrĂȘte lĂ . Violens est plus rock. Il y a chez eux quelque chose de teigneux, vĂ©nĂšre, nerveux, quelque chose (oserais-je le dire ?) de Radiohead qu’on ne trouve pas chez MGMT. Une approche « paranoĂŻd » de la pop qui les fait mitrailler leurs inflexions de garçons de plage et qui les rend tout aussi proches de groupes dark comme These New Puritans. Comme eux, ils occupent diffĂ©remment l’espace.

Sexe, mort et rock’n’lol

En fait, c’est comme si MGMT faisait dans le film de 2h30 et Violens dans le format plus catchy de la sĂ©rie. On retrouve d’ailleurs cette esthĂ©tique du coup de poing dans la sĂ©rie de 4 vidĂ©o clips qu’ils viennent de lĂącher sur le net. De vĂ©ritable concentrĂ©s de sexe, mort et rock’n’lol en phase avec la gĂ©nĂ©ration Youteub. Violens ? Plus Fight Club que fĂȘtard, Lynch que Jodorowsky, The Smiths que Spacemen 3. En somme moins Olive que Tom mais pas dit que ce soit pas les rois. (L’ITW)


Myspace de Violens

Site officiel de Violens

Clip de « Violent Sensation Descend »

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