M83 : MIDNIGHT CITY (CLIP)

Les lendemains de cuite j’aime bien me mettre « Wait » et regarder son clip. Il s’agit du 5e single qui a Ă©tĂ© extrait de Hurry Up, We’re Dreaming, le 6e album de M83, d’Anthony Gonzalez, jeune homme originaire d’Antibes. Je me rappelle que je n’avais pas aimĂ© cet album quand il Ă©tait sorti. On Ă©tait en octobre 2011, j’avais beaucoup aimĂ© les deux albums prĂ©cĂ©dent d’Anthony, Before The Dawn Heals Us et Saturday = Youth. A cette Ă©poque M83 ce n’Ă©tait dĂ©jĂ  plus que lui, et plus son duo formĂ© avec Nicolas Fromageau. Je l’avais d’ailleurs assez longuement interviewĂ© Ă  ces deux occasions, en 2005 et 2008. Mais lĂ , dĂ©finitivement libĂ©rĂ© des racines plus indĂ© de son ex compagnon de jeu, je trouvais qu’Anthony faisaient un peu n’importe quoi.

Avant il citait Ă  sa maniĂšre post French Touch – c’est-Ă -dire marquĂ© par les musiques Ă©lectroniques de Air et de Daft Punk – des groupes de rock des annĂ©es 90 comme My Bloody Valentine, Sonic Youth et MogwaĂŻ. Depuis que c’Ă©tait plus que son projet et que ça dĂ©collait vraiment Ă  l’Ă©tranger (tournĂ©e aux Etats-Unis en premiĂšres parties d’Interpol, The Killers, Kings of Leon et Depeche Mode), on y dĂ©celait d’autres marottes gĂ©nĂ©rationnelles, moins avouables, un cĂŽtĂ© guimauve, comme s’il osait enfin dire vraiment d’oĂč il vient : des canaux de masse des annĂ©es 80.

Le visage de Julee Cruise de Twin Peaks se confondait donc parfois Ă  celui de Sophie Marceau dans La Boum. On avait aussi droit Ă  quelques incursions new wave Ă  la Tear for Fears ou oxygĂ©nĂ©e Ă  la JMJ / Vangelis les disques exploitaient Ă  fond les 75 min de stockage du CD, mais ça allait, c’Ă©tait mutant, rĂ©ussi : le bon mix mainstream / indie. Or lĂ , Ă  mon humble avis, patatras : sur Hurry Up, We’re Dreaming, la balance s’Ă©tait inversĂ©e.

Le mec sortait un double album, 2 x 11 titres. Et pas que des bons, oh non. C’Ă©tait l’hecatombe, gros loukoum. Ça tirait clairement vers un truc Ă©pique et oecumĂ©nique neu-neu, genre Toto (« Africa », « Hold The Line »…) mais en pire (parce que perso, je les aime bien moi ces deux titres de Toto). Du « Johnny Clegg  2.0. » m’avait joliment rĂ©sumĂ© Bester de GonzaĂŻ.com. A 30 ans, fort de son succĂšs et de certaines rencontres, comme celle de Morgan Kibby du groupe The Romanovs, Anthony osait enfin chanter lui-mĂȘme sur ses titres, libĂ©rer son cƓur d’enfant sans filtre.

Je me rappelle de « Midnight City », son premier single. C’Ă©tait l’Ă©tĂ© 2011, le break annuel du mois aoĂ»t, une pĂ©riode honnie par tous les indie popeux. Ils aiment pas le soleil, la chaleur, l’hedonisme. J’en trouve un. C’Ă©tait Ă  une soirĂ©e GonzaĂŻ Ă  la « Maroq ». On discute, il me dit que ça faisait des mois qu’il se passait plus rien musicalement. J’avais pas tiltĂ©. Et lĂ  boum, l’eau dans le dĂ©sert, Ă  nouveau de l’excitation dans l’air. Le gars, sa vie redĂ©marrait, comment le contredire ?

Je sais pas, j’Ă©tais sceptique quand Ă  ce morceau. Son adulescence Ă©lectro, ses gimmick happy pop, son solo de saxo, je trouvais ça factice, de mauvais goĂ»t. Comment accueillir ça comme le messie, comme lui ? On aurait dit le BĂ©zu de la gĂ©nĂ©ration Y. Et fallait voir la pochette du single : c’Ă©tait quoi ce dĂ©guisement Ă  la mord-moi-le-nƓud ? Le mix de Chewbacca, Alf et E.T. sous ecsta ?

J’en aurais bien discutĂ© avec lui Ă  l’Ă©poque. J’aurais bien remis le couvert pour un troisiĂšme entretien pour GonzaĂŻ ou Parlhot, une der’. Histoire de. Boucler la boucle en quelque sorte. Ça s’est pas fait. Ça s’est pas fait parce qu’il Ă©tait alors archi demandĂ©. De toute part. Tous les mĂ©dias le voulaient. Des gros mĂ©dias. C’est qu’entre temps le petit frenchy s’Ă©tait installĂ© Ă  L.A. et les mĂ©dias ça les faisait mouiller de raconter l’histoire de l’enfant prodige qui cartonne lĂ -bas, et qui y cartonne tellement qu’il est parti. Ça les fait mouiller ça, la fuite des cerveaux. Le syndrome Daft.

Et c’est bien connu, « Quand le storytelling dĂ©passe la rĂ©alitĂ©, on publie le storytelling »*. Voyez ? Bref, en attendant d’en venir Ă  « Wait », Ă©coutons ce « Midnight City ». Et on se retrouve aprĂšs. D’ac ?

 

 

Interview de M83 Ă  la sortie de Before The Dawn Heals Us

Interview de M83 Ă  la sortie de Saturday = Youth

 

*dĂ©tournement parodique d’une citation cĂ©lĂšbre d’un vieux western amĂ©ricain (plĂ©onasme), L’Homme qui tua Liberty Valence, citation qui fut beaucoup utilisĂ©e dans les primes annĂ©es de la rock-critic française (plĂ©onasme) et qui dit que « Quand la lĂ©gende dĂ©passe la rĂ©alitĂ©, on publie la  lĂ©gende »Â